L’américanité des poètes français: le cas des Montévidéens

Études littéraires, vol. 47, 2 / 2018
sous la direction de Nelson Charest

Petite capitale de l’Uruguay qui a accueilli de nombreux migrants français au XIXe siècle, Montevideo a vu naître, en quelques dizaines d’années, Isidore Ducasse (1846-1870), alias le comte de Lautréamont, Jules Laforgue (1860-1887) et Jules Supervielle (1884-1960). Dans l’ensemble, ces trois poètes ont peu connu leur ville d’origine, émigrant en France dès leur jeune âge. À part Supervielle, ils ne retourneront pas en Amérique à l’âge adulte et ne conserveront pas de lien avec l’Uruguay, Ducasse et Laforgue étant d’ailleurs morts très jeunes (à vingt-quatre et vingt-sept ans). Si Montevideo a donc laissé peu de traces dans leurs œuvres, elle fournit néanmoins un aiguillon fertile à la recherche.

En posant d’un côté une américanité large, de l’autre une identité souple, et en disposant de Montevideo comme d’un horizon, d’un point de fuite révélé par la lecture, les articles composant ce dossier dévoilent une géopoétique aussi vaste qu’ambitieuse. Analysant une belle sélection de textes de Lautréamont, Laforgue et Supervielle, ils s’interrogent notamment sur le rapport de ces trois poètes français – qui apprennent d’abord l’espagnol – à la langue et à la figure paternelle, et sur les principes de liberté, de départ, de décentrement, de perte et de contestation qui les animent. La poésie que le lecteur est ici amené à découvrir est ni romantique, ni symboliste, ni classique et ni même surréaliste, mais plus volontiers à tonalité épique, ludique et merveilleuse, sans attache, sans remords et sans contrainte.

À travers les aphorismes de Lautréamont, la prose ironique de Laforgue ou la poésie en apparence traditionnelle de Supervielle, ce nouveau numéro d’Études littéraires nous fait non seulement découvrir des modèles poétiques souples et universels, mais lire, aussi bien, trois grands poètes de la modernité.

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